Au Maghreb, l’agriculture bio et organique en plein essor (source le Monde Afrique)

Mise à jour le 12 novembre 2021

Au Maghreb, l’agriculture bio et organique en plein essor

Source Le Monde Afrique (accéder au lien d’origine)

Maroc et Tunisie développent leur secteur depuis plusieurs années : huile d’olive, dattes, fruits et légumes, plantes aromatiques et médicinales en tête.

Récolte d’olives bio à Oudhna, près de Tunis, le 4 octobre 2021.  @ FETHI BELAID / AFP

C’est « l’avenir de l’agriculture » ! Sarah Shili montre fièrement des aubergines et grenades bio à peine cueillies près de Tunis. Au Maghreb, le bio connaît un essor sous l’effet de la demande locale et de l’export.

Tous les jours, cette gérante du Domaine Elixir Bio inspecte à Oudhna, à 30 km de Tunis, les 94 hectares d’une exploitation spécialisée dans des cultures certifiées bio. Ces productions qui « respectent la nature » représentent, à ses yeux, « l’avenir de l’agriculture en Tunisie et même dans le monde ».

La ferme a vu son chiffre d’affaires exploser « sous l’effet d’une forte demande et des ventes en ligne ». Entre 2015 et 2020, il a été multiplié par cinq à plus de 100 000 euros, malgré des prix « un peu plus élevés » que l’agriculture conventionnelle.

Les quantités produites sont encore insuffisantes pour répondre à la demande venant de l’étranger. Et à côté du « manque d’eau, comme pour tous les agriculteurs », il peut être difficile de « trouver les semences bio, il faut se débrouiller seuls », explique Mme Shili.

« Climat très favorable »

Le bio tunisien s’est considérablement développé lors des deux dernières décennies avec vingt fois plus de superficies cultivées en 2020 (320 000 hectares certifiés), explique Samia Maamer, chargée du bio au ministère de l’agriculture. Entre producteurs et commerçants, le nombre d’intervenants dans le bio a été multiplié par 24 pour atteindre près de 8 000.

Malgré la pandémie, le bio a « contribué à la dynamisation et à la diversification de l’économie » et représente « 13 % des exportations alimentaires, ce qui est important pour ce petit secteur ». Les exportations ont quasiment triplé, passant de 36 000 tonnes en 2013 à près de 90 000 tonnes en 2020. Sur les 250 produits bio cultivés en Tunisie, une soixantaine sont exportés : huile d’olive, les dattes, les légumes et fruits, les plantes aromatiques et médicinales.

Si la Tunisie figure au 30e rang mondial de l’agriculture bio, elle est la première en Afrique en termes de superficie certifiée et de produits exportés, d’après Mme Maamer.

« Le climat tunisien est très favorable à l’agriculture bio », dit-elle, en soulignant que seulement 5 % des 2 millions d’hectares d’oliviers plantés font l’objet de traitements aux pesticides. Potentiellement 95 % des plantations pourraient donc devenir bio. Il est, selon elle, envisageable d’arriver rapidement à « 1 million d’hectares en bio pour les oliviers et à 1,5 million d’hectares pour l’arboriculture et l’agriculture maraîchère ».

Le bio est « très demandé à l’international », notamment par les Etats-Unis et l’Europe, et localement, « il y a une forte demande des jeunes de 25 à 30 ans qui sont connectés et renseignés sur ses vertus », selon la responsable ministérielle.

A l’horizon 2030, la Tunisie veut aussi « développer un modèle rural spécifique » afin que le bio devienne « un moteur de développement local permettant de promouvoir d’autres secteurs comme le tourisme, l’artisanat, les énergies renouvelables », souligne-t-elle.

En décollage au Maroc

En comparaison, le bio est encore en phase de décollage au Maroc malgré un essor certain avec 10 300 hectares de cultures bio en 2020 contre 4 000 en 2011. « Cela reste très en deça du potentiel d’un pays agricole comme le Maroc », explique à l’AFP le président de l’Union marocaine des producteurs d’agriculture biologique, Reda Tahiri. Pour l’essentiel, ce sont des cultures d’oliviers, d’agrumes et d’amandes dans les régions de Marrakech (sud-ouest), de Rabat (nord-ouest) et de Souss-Massa (sud).

Le Maroc dispose aussi de près de 300 000 ha de cultures spontanées en plantes aromatiques et médicinales, comme l’arganier ou le cèdre. Il entend promouvoir le bio, désormais considéré comme « prioritaire » par le Plan gouvernemental Maroc Vert, à travers le financement des frais, élevés, de certification (jusqu’à 1 000 euros par hectare par an).

Le ministère marocain de l’agriculture prévoit d’atteindre les 100 000 ha de superficie cultivée d’ici à 2030 et une production de 900 000 tonnes par an, dont un tiers destiné au marché local et deux tiers à l’export.

En 2020, sur près de 130 000 tonnes, environ 14 000 tonnes de produits frais (fruits et légumes) et transformés (jus d’agrumes, fraises congelées ou huile d’olive) ont été exportées vers l’Union européenne, le Canada, la Suisse ou les Etats-Unis. « Il faut sensibiliser les consommateurs et augmenter les marges bénéficiaires des producteurs » si l’on veut accélérer le mouvement, analyse M. Tahiri.

Enfin en Algérie, si le marché bio est encore balbutiant, des magasins spécialisés proposent depuis quelques années aux citadins des paniers bio, fournis directement auprès de petits producteurs. Mais les surfaces cultivées ne dépassaient pas 1 200 hectares en 2013 avec 81 exploitations bio, selon le Centre de recherche en économie appliquée pour le développement.


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