AFD : « au sahel, la jeunesse est un atout pour le développement »

Mise à jour le 17 juillet 2019

AFD :  Jean-Marc Pradelle et Lisa Verrière : « au sahel, la jeunesse est un atout pour le développement »


L’extrême jeunesse de la population des pays du Sahel représente un défi majeur en termes d’éducation, de formation, de santé et de gouvernance. Mais, comme le précisent Jean-Marc Pradelle et Lisa Verrière de l’Agence française de développement (AFD), cette spécificité est aussi une chance pour la région.

Le Sahel se caractérise notamment par la jeunesse de sa population…

Jean-Marc Pradelle, Lisa Verrière : Entre 1990 et 2015, la population de l’Afrique de l’Ouest a doublé pour atteindre 367 millions d’habitants. 46 à 50 % des habitants ont aujourd’hui moins de 15 ans, la moyenne mondiale étant de 26 %. Environ 63 % de cette population a moins de 24 ans, soit environ 230 millions de personnes.

Cette réalité démographique représente un challenge de taille pour les décisionnaires et les entreprises qui doivent établir de bonnes conditions économiques, politiques et sociales pour le développement du bien-être des populations. Et ce, alors que les indicateurs de développement humain de la région sont parmi les plus faibles du monde. Le Niger, par exemple, est ainsi classé à la dernière place de l’Indice de développement humain sur les 189 pays analysés par le PNUD. 

Malgré une progression du taux d’alphabétisation des 15-24 ans, le Sahel compte par ailleurs 7,6 millions de jeunes analphabètes. Tout comme les systèmes éducatifs, les systèmes de santé demeurent précaires et ne parviennent pas à répondre aux besoins croissants de la population grandissante.

Les jeunes Sahéliens font face à la triple contrainte de la pression démographique, de la faiblesse de leur niveau de compétences et de la structure majoritairement informelle de leur économie. Ainsi, au Mali, seulement 10 % des 200 000 nouvelles entrées annuelles sur le marché du travail sont absorbées par le secteur urbain formel. Les autres entrants se répartissent entre les activités rurales – en grande partie informelles –, le secteur informel urbain, mais aussi les migrations et les activités illicites. 

Quels sont les défis induits par cette situation 

Ils sont nombreux ! En premier lieu, les systèmes éducatifs, de l’éducation de base à la formation professionnelle, doivent être renforcés pour accompagner les jeunes vers l’emploi sans nier la réalité des économies sahéliennes, majoritairement informelles.

Le niveau de compétences de la jeunesse sahélienne nécessite aussi le renforcement de l’accès aux systèmes de santé et de leur qualité, encore très précaires dans la région. Ainsi, seules 22,7 % des Tchadiennes reçoivent des soins à l’accouchement par du personnel soignant qualifié. De même, la nutrition, notamment maternelle et infantile, doit être améliorée, alors que près de 40 % des enfants de moins de 5 ans accusent un retard de croissance.

En outre, le déficit de gouvernance et de représentation politique de la jeunesse aggrave leur exclusion et entraîne une rupture de la confiance en l’État. Le système patriarcal des sociétés sahéliennes, où le pouvoir était historiquement concentré dans les mains des aînés, évolue et semble se craqueler. En cause, la croissance démographique qui fait des jeunes la population majoritaire, et les transformations liées à l’urbanisation et à l’ouverture croissante sur le monde qui diversifient les modèles familiaux.

Toutefois, la jeunesse africaine est un atout pour le développement. La résilience et le développement du Sahel viendront des populations qui l’habitent, et plus spécifiquement de la jeunesse, force vive porteuse d’amélioration et de changement.

Dans ce contexte, comment agit l’AFD ?

L’AFD contribue à l’accès à une éducation et à une formation professionnelle de qualité. Cela implique d’accompagner l’achèvement de la scolarisation des jeunes, en particulier des filles, premières victimes des fragilités des systèmes éducatifs. Une attention particulière est portée à la lutte contre les mariages et grossesses précoces. L’accès à l’eau, à l’assainissement et à l’électricité dans les écoles, l’amélioration de la nutrition et de la santé sont autant de leviers d’action pour le renforcement des capacités de la jeunesse sahélienne.

Les jeunes ont par ailleurs joué un rôle politique déterminant dans les évolutions politiques de certains pays sahéliens, notamment au Sénégal et au Burkina Faso. L’AFD encourage l’insertion des jeunes dans l’exercice de la citoyenneté et appuie le projet MédiaSahel, qui promeut l’inclusion socio-politique de la jeunesse à travers les médias.

La diversité des défis auxquels est confrontée cette catégorie de la population nécessite également une compréhension fine du contexte spécifique de la zone. L’AFD déploie des financements spécifiques pour la production de connaissances dans ce domaine. Elle accompagne différentes pistes de réflexions ouvertes par les Sahéliens pour redonner plus d’attrait à l’école aux yeux de la jeunesse et des familles, comme celle d’une meilleure prise en compte de l’éducation arabo-islamique.

Au Niger, un programme de recherche est piloté par le LASDEL, avec le concours de l’institution britannique ODI. L’analyse se focalise sur l’accès des jeunes aux diverses formes de travail, de leur adolescence à l’âge adulte. Cette recherche porte d’une part sur les formes de vulnérabilité qui déterminent le parcours des jeunes défavorisés vers la pauvreté, d’autre part sur l’examen des écarts entre le futur souhaité et les évolutions concrètes de leur trajectoire dans le marché du travail.

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