« Mise en lumière pour le climat » : Comment investir à la fois pour le climat et le développement de l’Afrique ?

Mise à jour le 28 janvier 2020

« Mise en lumière pour le climat » : Comment investir à la fois pour le climat et le développement de l’Afrique ?


A l’initiative de la Société d’Encouragement, en partenariat avec la Caisse des Dépôts, l’édition 2019 intitulée « Les entrepreneurs de COP en COP » a été consacrée au développement des territoires et aux actions pour l’Afrique.

Cette Mise en Lumière de collectifs d’acteurs et d’entrepreneurs, immédiatement après la COP 25, a permis de faire le point sur les enjeux et l’actualité de la lutte contre le réchauffement climatique et de présenter des actions concrètes et durables dans le respect de l’Accord de Paris. Ils ont par conséquent tenté de répondre à la problématique : COMMENT INVESTIR A LA FOIS POUR LE CLIMAT ET LE DÉVELOPPEMENT DE L’AFRIQUE ?

Intervenants : Pierre Victoria, directeur du développement durable de Véolia et Olivier Gilbert, ancien directeur du développement durable Afrique de Véolia, Armelle de SaintSauveur, directrice générale fondatrice de Moringa &CO, Denis Deschamps, délégué général de la conférence permanente des Chambres Consulaires Africaines (CPCCAF).

Notant la contradiction entre développement économique et développement durable, JeanPierre Cordier demande aux quatre participants comment résoudre cette apparente contradiction dans un objectif de lutte contre le réchauffement climatique en Afrique.

Pierre Victoria (Véolia) et l’exemple de Durban Rappelant que le métier principal de Véolia est l’accès à l’eau, l’assainissement et la maintenance, et à ce titre, présent en Afrique, Pierre Victoria souligne le lien entre le social et l’environnemental. Il rappelle que les pays pauvres sont les plus vulnérables aux catastrophes naturelles, les plus dépendants du patrimoine naturel et que dégrader le patrimoine naturel c’est les rendre encore plus pauvres. En Afrique, la stratégie de Véolia s’inscrit, comme partout ailleurs, dans le cadre de l’économie circulaire. En étant un acteur de l’économie circulaire on est un acteur de la lutte contre le réchauffement climatique. Indiquant que l’adaptation au changement climatique se fait en termes d’approche et d’innovation, Pierre Victoria prend, pour expliquer la stratégie de Véolia en Afrique, l’exemple de Durban (Afrique du Sud) où le stress hydrique est très important. L’approche de Véolia à Durban où la ville traite les eaux usées, a été de proposer à la ville de racheter les eaux usées, de les purifier et de les revendre aux industriels. Dans le cadre d’une joint-venture à 50/50 avec la ville, il a ainsi été possible de recycler 98 pour cent des eaux usées et d’en faire un usage domestique. Actant cette démarche du gagnant/gagnant, Pierre Victoria constate que « on peut trouver partout des solutions » et il délivre le message qu’il faut accompagner ces solutions au service des puissances publiques. « Nous ne donnons pas la solution mais sommes des contributeurs de solutions au service de nos clients » précise-t-il, concluant qu’on a « besoin de partage et de coopération. »

Olivier Gilbert et l’expertise « Accès » Olivier Gilbert explique pour sa part comment avec la mise en place de l’expertise « Accès » qui a notamment pour mission d’identifier et d’expertiser les fuites dans l’accès à l’eau (fuites d’eau résultant de la maintenance, fuites d’argent résultant notamment de la facturation, etc…) il est possible d’adapter les services gérés par Véolia au contexte et aux contraintes climatiques tout en prenant en compte les nécessités du développement des territoires. Dans le cadre du principe de l’égalité devant le service public, l’expertise « Accès » permet de distribuer le même service à plus de monde avec les mêmes installations et sans faire d’investissement supplémentaire.

Armelle de Saint-Sauveur et l’arbre Moringa De formation agronome, Armelle de Saint-Sauveur explique comment, dans le cadre du traitement des eaux en Afrique, elle s’est d’abord intéressée à l’arbre Moringa pour voir si on pouvait l’utiliser pour clarifier les eaux avant la purification. Cet arbre, le Moringa, a été planté par des agriculteurs partout au Niger tout simplement parce qu’il constitue une ressource alimentaire (on consomme sa feuille comme l’épinard).

Or à travers la transformation de sa feuille et de sa graine, cet arbre qui est une ressource agricole et économique, a également des effets climats : effet de captation de carbone, effet oasis et alternative à la consommation de viande en raison de son fort taux de protéine, et pas seulement en Afrique. Plutôt mal considéré, parce que utilisé comme la plante des grand-mères, la plante du pauvre et de la famine, le Moringa a commencé à intéresser les marchés africains, et plus encore… D’où l’initiative d’Armelle de Saint-Sauveur de créer à travers des ONG et grâce à des fonds européens le réseau « Moringa News » afin de faire connaître le Moringa. En 5 ans, le réseau a explosé. A partir d’une structure à toute petite échelle, un réseau mondial s’est créé, faisant de cette « plante de grand-mère » cultivée localement, un produit d’intérêt économique et climatique mondial. Bel exemple d’innovation, à partir de la mise en valeur d’une plante qui existait…

Denis Deschamps (CPCCAF) et les PME africaines Denis Deschamps présente les projets de coopération de la Conférence Permanente des Chambres Consulaires Africaines et Francophones (CPCCAF) pour 2020 avec un focus sur la future plateforme numérique Franco-fil qui sera lancée prochainement en partenariat avec la Société d’Encouragement pour l’Industrie Nationale. « Notre credo c’est que le développement économique en Afrique passe par le développement du secteur privé et par le développement des entreprises africaines». D’où l’importance du partenariat avec les entreprises africaines et plus spécifiquement les PME, et la nécessité de repérer les petites entreprises africaines modèles avec lesquelles il sera possible de passer des partenariats.

Stéphanie Rivoal : qu’allons-nous faire ensemble ? Invitée à donner son sentiment sur les interventions précédentes, l’ancienne Ambassadrice de France en Ouganda commence par une petite pointe de provocation : « Qu’est-ce que pensent les Africains qui nous regardent et nous écoutent ? ». On pense communément que l’Afrique doit se développer et donc le faire de manière durable. Or l’Afrique est le continent le moins polluant et sa population, la première victime du changement climatique. Nous demandons aux Africains de se développer de manière vertueuse alors que nous les Occidentaux, on a été incapables de le faire : si il y a des gens qui doivent faire des efforts, ce sont les Occidentaux, les territoires, les citoyens dans leur comportement, dans leur consommation d’énergie… Les Africains ont envie de se développer mais pas à leur détriment. Alors comment résoudre la quadrature de ce cercle ? « Je suis fascinée par l’innovation que je vois en Afrique et l’approche climatique : pour les Africains, l’agro écologie c’est naturel, ils font ça tous les tous les jours. C’est nous qui avons eu tout faux sur l’agriculture après la seconde guerre mondiale, en faisant de la monoculture, en coupant les arbres, en utilisant du chimique. Quelles leçons avons-nous à donner à l’agriculteur africain qui fait du bio ? Ce n’est pas un retour en arrière, mais l’Afrique où tout est recyclé par nécessité, est pour moi une source d’inspiration dans sa manière de grandir et de faire du développement économique de façon durable. » Présentant le prochain sommet France-Afrique, elle se demande : « Qu’allons-nous faire ensemble pour construire des villes et des territoires durables en Afrique et en France ? » et envisage dans la foulée un sommet professionnel France-Afrique.

« Car, dit-elle, on commence toujours par l’argent, or il faut commencer par les besoins et les projets qui y répondent, et ensuite se tourner vers les financeurs. » L’Afrique nouvelle priorité économique de la France ? Avec les marqueurs français que sont la protection de l’environnement et du social…


Afin d’en savoir plus sur la Mise en Lumière pour le Climat du 18 décembre 2019 :

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